Bonjour à tous,
J'ai décidé de détailler en une série d'articles les points fort du système, afin de vous montrer l'influence du système Hardi en jeu.
Je comprends que devoir lire 90 pages de règles ne soit pas aux goûts de tous, aussi, j'espère mettre en lumière avec ces courts textes certains points et particularités de Hardi qui me donnent satisfaction.
Article 1 — Une défaite cinglante sans effusion de sang (6/11/20)
Assez tôt dans l'aventure, mes PJ arrivent à mettre la main sur un joli magot (environ 1500 pièces d'argent, soit l'équivalent de 15 PO. Ça semble peanuts dans DD5 et consorts, mais l'une de mes optiques de jeu avec Hardi, c'est de redonner un sens à l'argent, et notamment la pièce d'or. Pour des fils de paysan, l'or c'est un peu comme le soleil : on peut le voir briller au loin, mais on ne le touche jamais. Bref, pour eux, c'est une fortune… et bien plus que ce que je veux qu'ils aient comme ressource à ce stade de la campagne, vu qu'ils sont niveau 2). Je décide qu'ils vont se faire détrousser, et tant qu'à faire, je vais en profiter pour leur donner un exemple de comment fonctionnent les attaques verbales (qu'ils n'ont jamais utilisé jusqu'à présent).
Alors qu'ils retournent paisiblement à leur village, je mets en place une dizaine de bandits dans les bois pour une embuscade. Je ne veux pas les inciter à tenter quelque chose d̶'̶h̶é̶r̶o̶ï̶q̶u̶e̶ de stupide, donc je mets le paquet : 12 bandits, dont 6 en hauteur avec des arbalètes. Pour autant, je veux être impartial : je veux qu'ils aient une chance de ne pas se faire tout voler.
Dans Hardi, vos PV ne sont pas des Points de Vie, mais des Points de Vaillance, qui indiquent votre détermination et votre capacité à continuer un combat. Les attaques réussies font baisser la vaillance des PJ (via de l'épuisement, des estafilades, de la démoralisation, de la peur …), mais seuls les critiques infligent de vraies blessures. À 0 PV, un perso est donc épuisé, découragé ou effrayé, mais nullement blessé.
Cette nuance permet donc de livrer de vrais combats verbaux (pensez aux combats d'insultes de Monkey Island) où les "attaques" (intimidation, négociation, pot-de-vin, charme…) ont pour finalité de diminuer la vaillance adverse à 0, afin qu'il dépose les armes, le tout sans effusion de sang.
Les attaques verbales sont des jets en opposition, faits selon l'un des 3 axes déterminés par l'attaquant — et les caractères, opinions et traits de personnalité permettent de nuancer avec des dés·avantages :
Intelligence lorsque vous faites primer la logique, la rationalité d'une situation.
Charisme lorsque vous essayez d'amadouer, de charmer, de plaire.
Sagesse lorsque vous voulez tempérer, calmer, ou au contraire exciter et énerver.
Un combat a donc eu lieu, sans une seule passe d'armes, uniquement à la discussion : mes bandits (avantagés par leurs compagnons tenant en joue les PJ) tour à tour intimidants ("un seul geste de ma part et vous êtes tous morts") ou logiques ("est-ce que ça vaut le coup de mourir pour votre bourse ?") face aux PJ leur tenant tête, essayant de leur montrer qu'ils vendraient chèrement leur magot.
Les PJ ont finalement dû céder, la peur de mourir l'emportant progressivement au fur et à mesure que leur vaillance baissait et que certains déposaient les armes ; mais non sans avoir fait douter quelques bandits par leur détermination.
Finalement, la situation a eu la même intensité qu'un combat — le stress de jets de dés, l'attrition progressive des PV —, s'est conclut en 3 tours et a eu je pense plus d'impact sur eux que si l'on avait réglé tout ça avec un unique jet de Charisme en opposition. Là, on a pu entendre les arguments et traits d'esprit, les voir faire mouche ou tomber à plat, et ressentir leur impact sur la vaillance des deux camps.
Les PJ eux, ont été marqué par cette session : elle a eu lieu il y a plus de 20 séances maintenant, ils ont depuis gagné plus de ressources que ce qu'ils avaient perdu à l'époque, mais ils en parlent encore avec une ironie teintée de rancœur et ont tous juré de se venger de ces bandits (qu'ils n'ont pas encore vraiment pourchassés pour l'instant).
Ah, au passage, si vous voulez que les PJ s'intéressent à votre Grand Méchant et veuillent à tout prix lui faire la peau, ne vous embêtez pas avec des plans de domination du monde ou d'extermination des humains : faite lui juste voler un truc qui appartient aux PJ 😂.
Article 1 bis — Plus de détails sur les combats verbaux (7/11/20)
Suite à une remarque sur un forum, je détaille un peu les combats verbaux, en recopiant ici mon message :
Hardi ne mécanise pas les décisions "[...]d'entrer ou non en combat avec un adversaire, d'intimider, d'envisager le repli, etc".
Ce qu'il offre comme possibilité, lors de ces échanges verbaux vindicatifs, c'est de traiter ça comme un combat (au lieu de le régler en un ou deux jets de CHA comme on le fait classiquement).
Lorsqu'un PJ attaque verbalement un adversaire, il essaye de deviner et choisir l'axe ou l'approche qui va être le plus impactant sur cet adversaire (axe = INT, SAG ou CHA ; approches = soudoyer, flatter, intimider …).
Le MJ de son côté détermine, improvise (ou a déjà préparé) la "réaction" du PNJ à chacun de ses axes et approches, en décidant ou pas d'accorder des dés·avantages.
Par exemple, Grundar, le géant vaniteux sera sensible à la flatterie (CHA), complètement hermétique aux menaces (CHA), sourd aux appels à la tempérance (SAG), et neutre face à la rhétorique (INT)… Vous pouvez également simplifier en choisissant juste ses réactions (avantage/désavantage/rien) face à INT/SAG et CHA.
Pour la résolution de l'attaque :
Soit vous faites faire le jet au PJ (en lui indiquant un éventuel dés·avantage selon l'axe/approche qu'il a choisi et la réaction du PNJ à cet axe/approche) Vs la même carac chez le PNJ.
Soit vous choisissez de ne rien indiquer aux Joueur·euses en faisant faire à votre PNJ une sauvegarde Vs la carac de l'axe/approche choisit par le PJ.
Les dégâts des attaques verbales diminuent les Points de Vaillance (PV) d'un adversaire (sa volonté/capacité à continuer le combat) ; mais n'infligent bien sûr jamais de blessures physiques.
Ainsi, chaque PJ du groupe va pouvoir faire entendre sa voix, ses arguments, pour faire baisser la vaillance adverse, jusqu'à l'amadouer/l'intimider/le soudoyer/le raisonner/… tandis que l'adversaire essaye de faire de même sur les PJ (ou bien sort son arme pour taper, il a le droit aussi ^^).
J'ai rarement autant de RP que dans ces moments-là, où chacun y va de son argument, de son idée, pour neutraliser un adversaire sans avoir à le blesser.
Mieux encore, ce système permet aux PJ non violents (sages/scholars/bardes/bouffons…) de participer à un combat* (même un combat en arme) en intimidant l'adversaire, en essayant de lui faire peur ("on est plus nombreux que vous, déposez les armes !"), ce qui fait baisser la Vaillance adverse au même titre qu'un coup d'épée ou de masse.
*Évidemment, ça ne marche que contre des adversaires intelligents et conscients.
Le truc que je dois encore affiner, c'est la quantité de dégâts qu'infligent les attaques verbales.
Je veux être incitatif, car après tout, toute créature vivante tient à sauver sa vie, et éviter un combat ne peut jamais nuire en ce sens ; mais je ne veux pas rendre la parole surpuissante non plus…
Article 2 — La peur de mourir (12/11/20)
Bonjour à tous,
Je continue ma série illustrant certains points forts de Hardi.
Aujourd'hui : La peur de mourir
Avec Hardi, je voulais des PJ qui soient héroïques et capables, mais qui ne se sentent jamais à l'abri du danger, ou d'un mauvais coup reçu malencontreusement. Rien de pire à mon sens que le PJ qui vous dit fièrement en plein combat : "Il fait d8 dégâts avec son épée, j'ai 80 PV, donc j'ai au moins 10 tours peinard pour le finir !".
Pour éviter cet écueil, dans Hardi :
Les PV (Points de Vaillance) sont plutôt limités en nombre.
Jugez plutôt l'évolution d'un PJ qui aurait systématiquement maximisé ses gains de PV au fur et à mesure de sa progression :
Niveau 1 : 2d8 PV max, soit 8 PV en moyenne.
Niveau 4 : 4d10 PV max, soit 22 PV en moyenne.
Niveau 7 : 7d12 PV max, soit 46 PV en moyenne.
Niveau 10 : 10d12 PV max, soit 65 PV en moyenne.
Niveau 20 : 20d12 PV max, soit 130 PV en moyenne.
Si un PJ est bien mis hors d'état de nuire une fois à 0 PV, les Points de Vaillance remontent à leur maximum après quelques minutes de pause (donc souvent à la fin de chaque combat).
De plus, les PV sont tirés au dé après chaque repos (8 h de sommeil et un repas), avec dés·avantage selon la situation. Il y aura donc des jours où vous serez en pleine forme, et des jours où vous ne serez pas bien vaillant.
Un PJ ne peut encaisser que 27 blessures, peu importe son nombre de PV.
Dès la 28e, il est mort. On reçoit des blessures à chaque coup critique (autant de blessures que de dégâts reçus) ou lorsque l'on reçoit des dégâts en étant à 0 PV (si une attaque vous fait passer à 0 PV, les dégâts excédentaires sont infligés sous forme de blessures).
Rajoutez à cela que les blessures demandent de longues périodes de soin pour être soignées, qu'elles ont une chance croissante d'infliger des désavantages et des séquelles (perte de point dans une caractéristique) et que les plus graves ne vous laissent que quelques tours à vivre, et vos Joueurs et Joueuses craignent réellement pour leur PJ, même face à des adversaires faibles, qui ne sont pas à l'abri d'un coup de chance aux dés.
Les soins (y compris magiques) sont bien moins permissifs et efficaces que dans les autres jeux.
Ça ne sert à rien de faire craindre aux PJ les blessures si le moindre coup de baguette magique les guérit instantanément ! J'aborderai la magie dans un futur article, mais en gros, si un PJ veut lancer un sort pour guérir des blessures, il va lui-même en subir (voyez ça comme un transfert de blessures), et il a 50 % de chance seulement d'en guérir plus qu'il n'en subit.
Quant aux potions de soin, leur prix et leur rareté évitera que le groupe n’en trimballe des litres.
Enfin, je teste en ce moment un mécanisme similaire à l'"escalation dice" de 13eme Age.
Appelé “dé d’aggravation”, c’est un dé qui sert de compte-tour, mais aussi de bonus croissant qui vient s'ajouter aux jets d'attaque des deux camps, afin d'augmenter les chances de critiques (qui ont lieu dans Hardi sur un 20 naturel, mais aussi quand le jet d'attaque dépasse 25) et donc la létalité des combats.
Après tout, un vrai combat est épuisant, et il semble logique que chaque camp ait de plus en plus de mal à parer et esquiver efficacement les attaques de ses adversaires. Je verrai comment ça “rend” en conditions réelles …
Tout ceci rend les combats tendus, car durs et surtout imprévisibles.
Dans quelques jours, je publierai la deuxième partie de cet article, qui illustre ces points par quelques exemples vécus.
N'hésitez pas à me contacter par mail ou à me retrouver sur le forum CasusNO si vous avez des questions !
À la prochaine, et d'ici là, soyez courageux, soyez Hardi !
Article 2 bis — La peur de mourir — exemples (19/11/20)
Bonjour à tous,
Voici la suite de l'article de la semaine dernière, avec des exemples tirés de situations de jeu vécues.
Aujourd'hui : La peur de mourir — par l'exemple
Premier combat
Leur tout premier combat — contre un hibours (4 DV) qu'ils sont allés titiller dans sa tanière alors qu'ils n'étaient que niveau 1 — s'est soldé par une fuite précipitée dès le 2e tour, après qu'un des PJ se soit retrouvé sur le carreau et salement blessé dès la première attaque de la bête. Ils ont immédiatement compris qu'ils n'étaient pas dans leur jeu Fantasy habituel, et qu'ils allaient devoir ruser un peu au lieu de foncer tête baissée et épée en avant.
Quelques jours plus tard, le blessé ayant été pansé et se remettant lentement, ils ont creusé une fosse garnie de pics en bois, se sont armés de lances (pour frapper la bête avant qu'elle ne puisse riposter — j'aborderai dans un autre article l'initiative dans Hardi), et ils ont pu facilement tuer la dangereuse créature.
Démonstration de puissance
Au cours d'un one-shot (Le mont Saint-Mikkel, disponible gratuitement sur le site) avec 2 PJ de niveau 6, lors du combat final contre Sauroctone, j'ai eu un coup de chance aux dés qui a permis de montrer que les PJ ne doivent jamais se sentir invulnérables et doivent rester sur leurs gardes.
Nous sommes au 3e tour de combat, et les PJ ont déjà subi des dégâts. Mon boss a lui déjà perdu plus de la moitié de ses PV, et il utilise sa dernière action du tour pour incanter une frappe démoniaque (+2d6 dégâts à sa prochaine attaque).
Arrive le 4e tour de combat. Mon boss encaisse encore des dégâts et se trouve mal en point. J'attaque un PJ à qui il ne reste que 2 PV dans l'espoir de le mettre hors d'état de nuire. J'attaque, et je fais un critique (le boss à +8 à l'attaque, ce qui revient à critiquer sur 18-20). Je lance mes dégâts (1d10+1 de son arme, + 2d6 de la frappe démoniaque) et obtiens 18.
Le PJ perd donc 18 PV : il lui en restait 2, il tombe à 0 et subit les dégâts excédentaires sous forme de blessures, soit 16 blessures. Plus les 18 blessures infligées par le critique (si dans les autres jeux, on double les dégâts en cas de critique, dans Hardi, un critique inflige à un PJ autant de blessures que de dégâts).
Je viens d'infliger 34 blessures en une seule attaque… je viens de littéralement couper le PJ en deux ! Les deux moitiés de son corps s'effondrent au sol sous les yeux incrédules de son compagnon, qui parviendra à venger sa mort au round suivant en tuant mon boss.
"Ben c'est normal que tu l'aies tué, il lui restait que 2 PV !"
Hé non ! Souvenez-vous que les PV dans Hardi sont l'image de la vaillance du PJ, pas du tout de son état physique. À 2 PV le PJ est certes presque démoralisé ou épuisé, mais encore parfaitement intact et pas blessé du tout.
Inutile de vous dire que l'on n'a parlé que de ça le lendemain, et qu'à l'avenir, ils réfléchiront (à se protéger, à fuir…) au lieu de bêtement taper dans le tas.
Quand la peur de mourir vous pousse aux pires extrémités
Avec toutes ces démonstrations, les PJ sont désormais plus prudents en combat.
Au point que tout récemment, l'un deux — pensant, dès le deuxième tour, leur combat contre le fantôme d'un mage meurtrier sanguinaire fort mal engagé — décide de négocier avec celui-ci un cessez-le-feu en lui offrant… l'hospitalité !
Oui, oui. Il lui a proposé de cesser les hostilités et d'investir son corps, afin que le fantôme puisse "vivre" à nouveau ! On joue une célèbre campagne Pathfinder, et vu la personnalité du fantôme et son passif, je doute que l'offre l'intéresse. Ce cas n'est évidemment pas prévu dans le scénario, mais après tout, pourquoi pas, il faut savoir accepter les propositions des joueurs, tout au moins leur laisser une chance, au lieu de dire bêtement "euh… non, c'est pas prévu dans le scénario".
Je lui demande donc un test de Charisme avec le désavantage… Après 2 beaux jets de sa part, me voilà en train de négocier les conditions de cette cohabitation inhabituelle. 😂
Je ne sais pas pour vous, mais moi c'est la première fois que je vois un PJ négocier une collaboration avec le Grand Méchant du scénario plutôt que de risquer un combat qui s'annonçait dangereux (je vous rappelle qu'on en était qu'au 2e tour, deux PJ seulement avaient reçu des coups, mais tous étaient debout, on était encore loin du TPK).
Bref, faites peur à vous joueurs, ils vous surprendront en échange !
Article 3 — Armes et initiative (27/11/20)
Je continue ma série illustrant certains points de Hardi. Aujourd'hui :
Armes et initiative
L’un de mes buts avec Hardi était de redonner leurs lettres de noblesse à la pléthore d’armes ayant existé dans l’histoire (la nôtre, pas besoin d’aller piocher dans celles de royaumes immémorés) mais qui sont trop souvent occultées par les trop classiques épées / dagues / haches / masses / arcs.
Pour cela, la première chose à faire était de rendre ces armes disponibles, en les listant dans le matériel, et ensuite d’inciter à leur utilisation.
Liste d’armes
Parti de l’excellente liste proposée dans Macchiato Monsters, j’ai étendu jusqu’à avoir actuellement 36 armes de mêlée et 25 armes à distance, toutes différentes, que ce soit sur leurs dégâts, leur prix, leur qualité ou leur maniement.
Le but n’est évidemment pas de noyer le joueur dans une liste interminable, mais d’offrir un aperçu de la diversité et variété d’armes utilisables en JdR Med-Fan, histoire de l’inciter à opter pour autre chose qu’une bête épée.
De plus, le système (optionnel) de tirage aléatoire du matériel de départ – issu du même jeu – permet d’aisément sortir de la routine en dotant un Aventurier d’une arme à laquelle le joueur n’aura pas songé.
Plus qu’une arme, elle devient une histoire, lorsqu’un paysan se retrouve se bat à la claymore, ou qu’un érudit manie les bolas.
Nature des armes
Hardi invite le MJ à utiliser le bon sens et la logique pour accorder avantage ou désavantage sur les jets de dégâts en fonction de leur nature (contondant, perforant ou tranchant) et la nature de la cible (humain, limon, golem de pierre, élémentaire…). Ainsi, une rapière n’a pas la même efficacité sur un humain que sur un crabe géant.
Hast
Sur les 36 armes de mêlée, 12 sont des armes d’hast – qui ont un long manche augmentant leur portée – et que je voulais mettre à l’honneur dans le système afin de refléter leur importance historique.
Ainsi, pour refléter leur portée accrue, les armes d’hast attaquent avant les armes de contact.
Initiative dans Hardi
Dans Hardi, le système d’initiative implique deux facteurs :
la distance avec la cible (qui découpe le tour en 5 phases, selon qu’elle soit 1-Loin / 2-Distant / 3-Proche / 4-Contact / 5-Magie)
le jet d’initiative, qui détermine, à chacune de ces 5 phases, quel camp agit en premier durant ce tour.
Distances
Ainsi, les attaques à distance (Loin ou Distant) portent en premier en fonction de l’éloignement de la cible ; puis les armes d’hast attaquent durant la phase “Proche”, et celles de contact durant la phase “Contact”.
La Magie – peu importe la portée du sort – passe en dernier, afin de représenter le temps d’incantation et de compenser sa puissance (qui sera abordée dans un futur article).
C’est la distance de la cible qui compte pour la phase, pas la portée de l’arme. Un archer qui se retrouve rejoint au contact par sa cible tirera en phase 4 s’il garde la même cible (et avec un désavantage en plus, à cause de la portée trop faible).
Tout le monde à l’arc alors ?
Eh non, car l’avantage de tirer en premier des armes à distance (armes à feu, de tir, de lancer…) est équilibré par le système (issu là encore de MM) : lorsque vous tirez sur une cible qui n’est pas isolée, le jet d’attaque est fait avec l’avantage, mais la cible est déterminée au hasard (ben oui, une mêlée, ça tourne, ça bouge… ça ne reste pas immobile à attendre vos flèches) !
Hardi prévoit qu’il est possible d’échanger un avantage contre une prouesse, par exemple viser quelqu’un de précis dans une mêlée. Et si le tireur rate son test de visée, il peut retenir sa flèche, pour ne pas risquer de blesser un compagnon.
Tout cela offre des dilemmes tactiques intéressants, où un guerrier devra parfois se retenir d’aller au contact pour laisser les arbalétriers et archers grêler les rangs adverses sans risque, et où un lanceur de shuriken va pouvoir prendre le risque d’en coller un dans le dos d’un allié en plein duel s’il souhaite attaquer la même cible.
Jet d’initiative
Le jet d’initiative revient aux origines, avec un unique jet de dé (faisable avec le dés·avantage selon les circonstances) qui détermine le camp ayant l’initiative à chaque phase pour ce tour.
Cela à l’avantage d'être simple et rapide, et pousse là encore à mettre l’accent sur la tactique de groupe, plutôt que la chance individuelle.
Conséquence en jeu
Dans ma campagne en cours, tout cela se traduit par une plus grande versatilité et adaptabilité des PJ : tous ont deux ou trois armes différentes, et en changent en cours de combat en fonction de la situation et de l’ennemi : le mage a une arbalète, l’archer lance quelques sorts, le barbare a des haches de lancer…
Fini les héros qui tapent toujours avec leur arme la plus puissante sans réfléchir !
Article 4 — L’équipement de départ (05/12/20)
Je continue ma présentation de Hardi avec un court article à propos de…
L’équipement de départ
Ce point n’est pas spécifique à Hardi, car il s’agit en fait d’une idée que j’ai reprise de l’excellent Macchiato Monsters d’Éric Nieudan, et que j’ai mitonnée à ma sauce.
Dans Hardi, il est possible (mais pas obligatoire, si cela ne vous plait pas – mais j’espère vous inciter par cet article à tester cette approche) de déterminer au hasard le matériel et l’équipement dont dispose votre Aventurier suite à sa création.
Pour cela, munissez-vous d’un d4, d6, d8, d10, d12 et d20 et des tables d'équipement (visibles via ce lien, onglet “Table d’équipement”) du jeu.
Vous choisissez l’une des six tables (Armes de mêlée, Armes à distance, Armures, Consommables, Équipement, Richesses), et un des six dés, que vous lancez dessus pour découvrir ce que vous possédez. Vous pouvez choisir plusieurs fois la même table si vous le souhaitez.
Après avoir lancé chacun des six dés, votre Aventurier est équipé.
Ce que disent les tables…
Si les tables d’armes, d’armures et de consommables sont classiques (bien que fournies, voir l’article de la semaine dernière au sujet des Armes), celles d’équipements et de richesses sont orientées : elles laissent deviner en creux une histoire, qui ne sera pas la même si vous tirez "Rien que 4𐐔 en poche, et une ardoise de 17𐐔 dans un rade miteux" ou "21𐐔 au fond d’une besace, et un herbier complet qui vaut bien 7𐐃".
(J’aborderai le système monétaire dans un futur article, mais 1𐐃 est une pièce d’Or, qui équivaut à 100 pièces d’argent [100𐐔]).
De même, si votre équipement consiste en “Un chien, un large chapeau de paille, du gâteau à la citrouille Δ6, une fourche”, il laisse deviner une tout autre histoire que “Une longue cape, du pemmican Δ8, un sac de cuir, une monture fatiguée”.
Ainsi, via ses possessions de départ, votre Aventurier laisse déjà transparaitre une histoire, alors que vous ne l’avez même pas encore joué une seule fois.
Histoires
Si j’insiste bien sur ce terme d’histoire, c’est pour bien appuyer le fait que tout votre équipement initial (armes, argent, vêtements…) correspond aux biens que détient votre Aventurier au moment où le joueur ou la joueuse le prend en main. Cela veut dire que tous ces objets n’ont pas forcément à être les siens.
Il peut s’agir de matériel volé, emprunté, utilisé pour vous déguiser ou bien rapiné sur un champ de bataille…
C’est au joueur/joueuse d’inventer l’histoire qui concilie l’image qu’il a de son Aventurier avec l’image que l’Aventurier donne au début du jeu. Ces deux images peuvent être très proches, ou diamétralement opposées.
Dans tous les cas, touchez-en deux mots au MJ, pour lui raconter succinctement (on ne parle pas décrire 10 pages de background) quelle est la vie de votre Aventurier, et ce qui l’a mené à sa situation actuelle.
Le MJ devrait vous poser en retour des questions, demander des noms et des précisions (“Ah, tu as fui ton père violent ? Il s'appelle comment, il habite où ?”), pour par la suite réintroduire ces éléments pour donner quelques touches personnelles et intimes à vos aventures.
Voilà comment 6 jets de dés et un peu d’imagination dotent votre Aventurier d’une histoire personnelle sans doute plus originale (et plus rapidement crée) que celle que vous auriez concoctée par vous-même.
Article 5 — Les sous (10/12/20)
Aujourd’hui, dans ma série d’articles abordant les particularités de Hardi :
Les sous !
Je me suis souvent fait la remarque, confirmée dans les dernières campagnes “med-fan” que j’ai jouées ces dernières années (du Adventures in Middle Earth et Sunless Citadel motorisé par Five Torches Deep – un jeu qui utilise un système gold as XP) que l’argent qu’on trouve ne sert en fait… presque à rien :
Les armes et le matériel, on les loote principalement dans les donjons.
Les petites dépenses courantes (bouffe, logement…), on les laisse vite tomber car c’est une plaie à gérer (on veut des combats, pas de l’économat !).
On dépense de temps à autre quelques pièces pour une potion de soin, une réparation ou, en OSR, pour embaucher des hommes de main ; mais ce sont souvent des sommes dérisoires par rapport à ce que l’on possède.
Et finalement, on accumule plein de pognon en cours de campagne (souvent d’ailleurs des sommes physiquement intransportables, ça pèse lourd 10 000 PO ^^) jusqu’à ce qu’on demande au MJ de nous trouver un truc à faire avec (comme acheter une auberge ou un château… quand la campagne nous vous en file pas déjà en récompense :-/).
Ensuite, je n’aime pas l’omniprésence de la pièce d’or en JdR : étant la monnaie de base de nombreux jeux, cela conduit à gonfler les prix de manière délirante (j’ai en tête un passage d’un scénario Pathfinder où une lame de faux empoisonnée que l’on retirait d’un piège l’utilisant se revendait pour 1762 pièces d’or !) et en conséquence à coller dans la bourse de n’importe quel péquin des dizaines ou centaines de pièces d’or pour qu’il puisse simplement faire ses courses. De plus, les pièces de cuivre et d’argent ne servent alors strictement à rien.
Bref, parti de ce constat, je voulais, dans Hardi, rendre sa valeur à l’argent.
Le système monétaire
Premier point, le système monétaire de Hardi est en base 100, et pas en base 10 comme dans bon nombre de jeux : il faut 100 pièces d’argent pour avoir l'équivalent d’une pièce d’or. La monnaie reste le classique Cuivre / Argent / Or / Platine.
Deuxièmement, la pièce d’argent est la pièce de base, utilisée par les gens du commun (dont sont issus la plupart des Aventuriers à la création), tandis que les pauvres se rabattent sur les pièces de cuivre.
Ce faisant, l’or redevient un marqueur social de réussite et de richesse. Je voulais que les joueurs perçoivent une pièce d’or comme ils le font d’un billet de 200 ou 500 € IRL : ça existe, vous en avez déjà vu, peut-être eu ou tenu un, vous possédez sans doute plus que ça au global, mais ce n’est clairement pas ce dont est rempli votre porte-monnaie et ça semble réservé aux plus fortunés.
Voilà la perception que les Aventuriers débutants devraient avoir, et acquérir sa première pièce d’or est un objectif personnel tout à fait valable à bas niveau. Une fois devenu des Aventuriers chevronnés (vers le niveau 4, où ils auront l’occasion pour la première fois d’augmenter leurs compétences martiales), il sera alors logique pour eux d’obtenir leurs premières pièces d’or : cela marque la rupture entre leur vie précédente de paysan rêveur et leur nouvelle carrière d’Aventurier.
Le train de vie
Ensuite, pour rendre sa valeur à l’argent, il faut lui donner une utilité, réelle et quotidienne. Mais sans tomber dans le piège Économat RPG qui vous fait compter les bouts de ficelles.
Pour cela, Hardi introduit la notion de train de vie : une dépense journalière et obligatoire, tirée au d10, qui couvre vos dépenses classiques de la journée (gite, couvert, tournée à l’auberge, décrassage aux bains, services physiques personnels, passage chez le barbier…)
Le train de vie d’un Aventurier est choisi par le joueur, qui pourra ainsi choisir de le faire vivre en dessous ou au-dessus de ses moyens. Chaque soir, le d10 est lancé et éclaire vos dépenses de la journée :
si la valeur est faible, vous vous êtes contenté d'acquitter le minimum (gite et couvert),
si elle est élevée, vous avez mené grand train (pour votre train de vie choisi, qu’il soit pauvre ou prospère), en payant des coups, en vous payant des extras…
Mieux, le jet de train de vie peut être générateur d’histoire, comme cette soirée de débauche, avec tout cet alcool et ces filles, qui ne vous aura couté que … 2 pièces d’argent ?! C’est louche, non ?
Choisir de mener un train de vie élevé offre certains avantages mécaniques comme vous pouvez le voir dans le tableau ci-dessous ; mais l’inverse est également vrai :
Train de vie
Intitulé Dépense quotidienne bonus / malus
Miséreux d10 𐐕 -4 PV chaque matin - 2 CHA
Pauvre d10*10 𐐕 -2 PV chaque matin
Modeste d10 𐐔
Prospère d10*10 𐐔 +2 PV chaque matin
Aisé d10 𐐃 +4 PV chaque matin + 1 CHA
Riche d10*10 𐐃 +8 PV chaque matin + 2 CHA
Aristocratique d10 𐐙 +16 PV chaque matin + 3 CHA
Royal d10*10 𐐙 +32 PV chaque matin + 4 CHA
Un train de vie choisi doit généralement être maintenu (par peur du qu’en-dira-t-on, surtout chez les plus riches) et l’être humain est ainsi fait qu’il aspire toujours à mieux et rechigne à devoir se priver de ce qu’il estime désormais indispensable à son bien-être (du passage matinal chez le coiffeur… au bain chaud dans du lait d’ânesse).
Bien entendu, le maintien de son train de vie habituel ne sera pas possible partout (dans les petits villages par exemple) et le système de train de vie est suspendu au fin fond des donjons ou d’une sombre forêt : dans ce genre de lieux ou l’on ne peut pas dépenser d’argent, tant qu’on peut dormir et manger à sa faim, on considère que le train de vie modeste s’applique ; mais le MJ peut baisser celui-ci si les conditions empirent (pas d’abri, pluie, manque de nourriture…).
N'hésitez pas à consulter les règles (p. 80 et suivantes) pour plus de détail sur cette petite mécanique fort intéressante, qui va enfin rendre l’argent utile, et inciter vos PJ à dépenser leur pécule !
Article 6 — La magie (17/12/20)
J’aborde les fêtes et termine l’année avec un article qui aborde la magie dans Hardi.
La Magie
Avec Hardi, je voulais offrir de la versatilité :
1/ Sur l’usage ou non de la magie dans le jeu, qui peut être complètement supprimée pour faire de Hardi un jeu Low-Fantasy, mais où les spécialités permettent quand même aux Aventuriers qui le souhaitent (en accord avec le MJ) d’avoir ce petit truc en plus, cette petite compétence un peu surnaturelle ou étrange que personne n’explique.
2/ Sur l’accessibilité de la magie, qui par défaut, peut-être pratiquée par n’importe quel Aventurier qui y aura été formé. Ceci afin de pouvoir vous créer un perso aux petits oignons, du guerrier illusionniste à l’archer élémentaliste !
3/ Sur la magie en elle-même, qui est de type “libre” : pas de sorts à choisir dans une liste, mais des sorts à créer en accord avec le MJ, qui auront tous une composante chiffrée (que ce soit une quantité, une durée, une portée…).
En plus des sorts qu’il a inventés, chaque Aventurier dispose d’un niveau de pouvoir magique, nommé Échelon, qui lui permet de doser la puissance (et le coût) de ses sorts en choisissant à quel échelon (inférieur ou égal à celui du lanceur) le sort est lancé.
L'échelon d’un sort détermine donc la puissance de son effet, et également son coût, selon deux règles immuables :
Le coût en PV d’un sort est égal à son échelon.
Le dé d’effet du sort (qui détermine la quantité chiffrée) est égale au double de l’échelon.
Un petit exemple pour vous éclairer :
Le mage Wilbur dispose d’un Échelon maximum de 4. Il lance rayon ardent sur un gobelin, à l'échelon 3 : le sort lui coûte 3 PV, et il inflige d6 dégâts.
Ensuite, il lance sable mouvant (il s’est mis d’accord avec le MJ pour que ce sort immobilise une seule cible pendant X tours, mais il aurait pu choisir à la création du sort d’immobiliser jusqu’à X cibles pendant un tour) à l’échelon 2 : il perd 2 PV, et immobilise sa cible pendant 1d4 tours.
De cet exemple, vous pouvez tirer deux conclusions :
La magie (et surtout les sorts d’attaque) dans Hardi à 50% de chance de vous coûter plus de PV qu’elle n’en fait perdre à votre adversaire.
La magie ne requiert pas de test pour fonctionner. Ben oui, c’est magique ! Cependant, les sorts les plus “expéditifs” peuvent offrir une sauvegarde à l’adversaire.
Ajoutez à cela la possibilité de lancer plusieurs sorts par tour (à partir du niveau 4), d’incanter en mode intense (à plusieurs échelons simultanément, contre un drain (temporaire) de 2 points de CONstitution) ou en mode critique (doublez le résultat des dés, mais le lanceur subit 2 blessures), ou encore tout cela à la fois, et la magie peut se montrer dévastatrice, aussi bien pour l’ennemi que pour un lanceur imprudent.
C’est pour ces raisons, afin de compenser sa puissance, que la magie passe en dernier dans l’ordre d’initiative du tour.
Pour les PJ lanceurs de sort, la magie devient un petit jeu de gestion de ses PV et blessures, une prise de risque qui peut s'avérer décisive et payante, surtout si vos compagnons sont prêts à vous défendre lorsque vous serez affaibli.
Je vous invite à jeter un œil aux règles de magie (à partir de la page 47) pour en découvrir toutes les subtilités.
Petite pause hivernale d’au moins 2 semaines pour ces articles, histoire de profiter des fêtes en famille ; alors je vous souhaite de passer d’heureuses fêtes de fin d’année et je vous retrouve en 2021, avec quelques surprises…
Article 7 — Le nouveau système de combat (01/01/21)
Bonne année 2021 à tous !
Je vous souhaite une année à venir meilleure que celle passée (ça ne devrait pas être trop difficile), Hardie et non pas ardue.
J’entame 2021 sur les chapeaux de roue, avec de grosses modifications du système de combat dans Hardi. Vous avez désormais accès à une version révisée du document de règles.
Note : Ce que je vous présente ici est encore en cours de playtest et sera sans doute amené à évoluer.
Un nouveau système de combat ?
Oui, car si le précédent, très classique, nous a donné satisfaction durant plus de 30 séances de test, le souci s’est fait sentir dès que les Aventuriers sont passés niveau 4, car c’est à cette occasion qu’ils ont pu obtenir 2 actions de combat par tour. Et d’un coup d’un seul, les combats sont devenus… deux fois plus longs ! Argh !
Les combats, c’est sympa, c’est emblématique des jeux Med-Fan, mais à mon sens, ça doit rester rapide, intéressant et punchy.
Fast & Fun & Furious
J’ai donc remis la casquette de game-designer (celle qui m’a fait gagner deux fois le défi “Trois Fois Forgé” en 2,5 participations, elle porte chance) afin de trouver des solutions à ce problème : comment rendre les combats, rapides, intéressants et impliquant pour la tablée ?
Le dé d’aggravation
Cette mécanique provient initialement de 13th Age, mais je l’ai adaptée légèrement : le dé d’aggravation est un dé, visible par toute la tablée, et qui n’est jamais lancé. Il commence sur la face “1”, et sert à deux choses :
il sert de compte-tour pour le combat,
la valeur qu’il affiche est un bonus appliqué à tous les jets d’attaque du tour (pour les PJ comme pour les PNJ).
C’est une mécanique simple et efficace, qui reflète la fatigue en combat : plus celui-ci dure, et plus il est aisé de blesser un adversaire (ou d’être blessé) grièvement.
Il offre aussi l’avantage d’éviter de plus en plus les tours où il ne se passe pas grand-chose quand tout le monde loupe ses jets d’attaque. Ainsi, le dé commence sur 1 et offre déjà un bonus de +1 aux attaques de tous les combattants, et cela augmente à chaque tour : +2, +3, +4…
Souvenez-vous qu’un jet d’attaque supérieur à 25 est un critique dans Hardi et vous devinez que cela évite les combats qui trainent en longueur.
Les choix tactiques
Je voulais offrir des combats rapides, mais qui soient également autre chose que des échanges statiques de coups, et surtout qui impliquent les joueurs tout du long (et pas uniquement durant leur tour).
Pour cela, j’ai eu l’idée de proposer, pour chaque action de combat dont dispose un Aventurier, des choix tactiques :
Faire une action. C’est le plus classique, et cette action sera généralement un jet d’attaque contre un adversaire. Mais cela peut être autre chose, comme un déplacement supplémentaire, ou une manipulation (barricader une porte, chercher un interrupteur…) Cette action sera résolue selon le système d’initiative présenté précédemment dans l’article 3.
Aider. Donner un bonus de +3 à un test, si le MJ l’autorise. Cela peut être sur un jet d’attaque, ou pour aider un compagnon. Il est possible de s’aider soi-même.
Gêner. Donner un malus de -3 à un test, ou imposer un test sur une action (un déplacement, l’incantation d’un sort…), si le MJ l’autorise. Il est possible (mais stupide) de se gêner soi-même.
Protéger. Offre un bonus de +3 à la DEFense d’un personnage pour le tour, si le MJ l’autorise. Il est possible de se protéger soi-même.
Pour ces trois derniers choix (aider, gêner, protéger), les personnages doivent être en mesure d’agir selon la fiction (on peut difficilement aider quelqu’un qui se trouve dans une autre pièce par exemple) ; mais ils peuvent par contre être annoncés par les joueurs lorsqu’ils le souhaitent, avant que les dés ne soient lancés. Cela demande au MJ d’annoncer clairement actions et cibles (ce qui n’est pas plus mal) pour que les joueurs vigilants puissent déclarer leurs choix tactiques en réponse.
Et c’est là que le système devient intéressant, car il renforce le lien Joueur – Personnage en les incitant à être attentifs durant tout le combat : si un joueur distrait n’annonce pas que son personnage se protège d’une attaque ennemie, et bien l’Aventurier n’a tout simplement pas eu le temps de se protéger.
Versatilité
L’intérêt de ce système de choix tactiques est multiple :
Il offre de la versatilité tactique et accélère les combats en diminuant le nombre d’attaques chaque tour : un Aventurier de niveau 7 qui a 3 actions de combat par tour pourra choisir soit d’attaquer 3 fois, soit une seule fois mais avec un bonus de +6, ou encore un mix des deux (une attaque à +3 et une normale).
Il encourage la tablée à être attentive tout du long, et à s’entraider : protéger un allié blessé, appuyer les arguments d’un compagnon pour remporter une joute verbale, collaborer à trois pour que l’un d’entre eux puisse placer une attaque à +15 contre un dragon, empêcher un gobelin de fuir et d’aller donner l’alerte…
Mieux encore, cette versatilité offerte permet au MJ de varier ennemis et situations en combat :
Offrir des ennemis redoutables, mais sans en faire des sacs à PV : donnez une DEF de 24 à votre dragon, et les PJ réaliseront bientôt que s’ils ne collaborent pas, ils vont avoir peu de chance de réussir à le blesser ! Ça a quand même plus de gueule quand la guerrière parvient à planter son épée en bondissant sur la bête parce que l’elfe fait diversion et que le nain l’aide à grimper sur un surplomb, plutôt que lorsqu’ils se collent tous les trois au bestiau en le matraquant jusqu’à roller un 20 nat !
Plus besoin de retenir vos coups sur les blessés : ce sera aux Aventuriers de s’organiser pour protéger les plus faibles en leur octroyant des bonus de DEF.
Des situations plus dynamiques : trouver l’interrupteur qui arrête la descente du plafond pendant que les autres retiennent le cube gélatineux ; collaborer pour bloquer la clef mécanique qui anime ce terrible golem de métal, harceler le shaman kobold pour l’empêcher de lancer ses sorts dévastateurs, combattre un lancier entouré de 4 porte-boucliers qui ne font que le défendre… Le système permet de gérer simplement des situations tactiques autres que de simples échanges de coups.
Voilà, j’espère que ce petit aperçu des nouvelles possibilités offertes par Hardi vous inciteront à le tester. N’hésitez pas à me faire vos retours dans ce cas.
Bonne année,
Soyez Hardi !
Article 8 — Le temps de vivre (08/01/21)
Bonjour à tous.
Dans l’article de cette semaine, j’aborde ma conception de la temporalité en JdR, et la façon dont hardi vous incite à l’appliquer.
Cet article est polémique, dans le sens où mon point de vue peut être différent du vôtre et où mes arguments sont tout à fait réfutables. Je n’essaye pas ici de vous convaincre que j’ai raison, j’y expose juste les éléments qui précisent en quoi Hardi diverge de l’approche majoritairement choisie par les autres JdR Med-Fan.
Trop vite, trop tôt
Ces quatre mots résument assez bien mon sentiment sur la temporalité vécue par les personnages et ressentie par la tablée lors des parties med-fan habituelles : tout (rencontres, quêtes, déplacements, passage de niveau…) arrive rapidement ou se réalise immédiatement ; ce qui donne souvent à penser que l’on picore un “résumé” de l’histoire de nos personnages (où n’existent que les moments marquants ou intéressants de leur histoire) plutôt que de “vivre” leur vie.
La raison en est simple : il est compliqué de réunir une tablée de 4 à 6 joueurs et joueuses, donc personne n’a envie de séances “inutiles”, où l’on vivrait les temps morts et les périodes creuses de l’histoire de son Aventurier·e.
Cela conduit la plupart du temps :
à ellipser les voyages (je ne connais que The One Ring / Adventures in Middle Earth qui en fasse une phase de jeu importante),
à avoir des soins magiques qui soient immédiats,
à avoir des passages de niveaux dignes de World Of Warcraft,
et à boucler des campagnes entières (du niveau 1 à 6 ou 10) en … 1 mois de temps intradiégétique (le temps qui passe dans la fiction, pour vos personnages).
Or, si je suis conscient que personne (pas même moi) n’a envie de passer des séances de jeu à voir son perso couper du bois pour l’hiver ou vanner des céréales, ne serait-il pas intéressant que les personnages, eux, vivent ces périodes de creux, ces journées paisibles et agréables, loin des massacres que vous leur infligez au quotidien ?
J’y vois plusieurs intérêts, que je vais aborder rapidement : un ancrage plus réaliste dans l’univers de jeu, et par contraste, une mise en exergue des moments d’aventure, donnant plus d’épaisseur à vos personnages.
Faire plus vrai
Le premier aspect d’une temporalité ralentie est la vraisemblance de l’univers de jeu.
[Cela peu semble paradoxal vu que l’on joue dans des univers Med-Fan imaginaires, mais ce qui fait leurs succès est justement la confrontation du réaliste (les notions de temps, gravité, géographie… ont le même sens qu’en vrai) et du merveilleux. Inversez la temporalité, faites faire le yoyo à la gravité et danser la Macarena aux frontières et continents, et soudain ce n’est plus du Med-Fan, c’est du Nawak avec des dragons].
Bref, tout Med-Fan qu’il est, pour une meilleure immersion, l’univers doit nous sembler réaliste sur les points que la tablée considère d’emblée comme les plus terre à terre et similaires à notre réalité.
Passer de niveau
Or, nombre de jeux induisent déjà une disparité lors du passage de niveau, qui est vécu comme une sorte d’événement magique qui *DING !* octroie immédiatement à votre Aventurier de nouvelles forces et capacités. Cette incongruité est facilement acceptée, car elle arrange notre côté Gros-Bill, mais à y réfléchir, elle est dissonante : votre héros sue, saigne et respire comme vous, il y a donc peu de raisons pour que d’un coup d’un seul, il soit plus fort, bénéficie d’une nouvelle capacité ou aie accès à de nouveaux sorts.
Quiconque a déjà fait de la musculation le sait, ce n’est pas en une journée ni une semaine (ni même en un mois) que vous allez vous transformer en Schwarzenegger. Il est donc anormal que votre Aventurier gagne 1 point de FORce parce qu’il aura manié l’épée toute la matinée.
Pour réintroduire du réalisme, dans Hardi, le passage de niveau n’est pas une progression magique et immédiate de vos capacités, mais plus une indication que votre Aventurier maitrise suffisamment ses capacités actuelles pour se sentir en mesure de les améliorer ou d’en apprendre de nouvelles.
Il lui faudra donc trouver et payer quelqu’un pour l’entrainer ou l’instruire, et ce pendant environ quinze jours. Outre une temporalité plus réaliste, cela participe aussi à donner une utilité à l’argent (voir l’article 5 : les sous).
Guérir
L’autre point sur lequel Hardi essaye d’ancrer une temporalité plus réaliste est la guérison des blessures. C’est un choix de design, qui ne plaira pas forcément à tous, mais qui est essentiel à mon intention de voir passer le temps en cours de campagne.
Sans rentrer dans les détails (c’est p.54 des règles pour les curieux), chaque blessure (reçues en cas de coup critique) va demander du temps pour guérir :
Les blessures légères (les 9 premières) guérissent toutes seules à raison de 1 à 2 par nuit de repos.
Mais les blessures plus graves vont demander des soins, puis une période de convalescence nécessitant au moins 1d6 jours par blessure grave. De quoi coller les plus blessés au lit pendant quelques semaines. Ça reste rapide en termes de métabolisme (plantez-vous un couteau dans le bide, on verra si vous refaites le mariole sous quinzaine) mais ça me semble déjà mieux que *Hop, potion de soin, guéri !*.
Et pendant ce temps ?
Pour occuper les PJ pendant que leurs compagnons guérissent (car c’est cela qui va générer le plus de temps libre pour le groupe), Hardi leur propose deux options :
Travailler. Que ce soit pour aider dans aux champs, renforcer la garde ou faire de petits boulots çà et là, cela permet à un Aventurier d’engranger chaque jour, net (le train de vie est automatiquement déduit), autant de pièces d’argent que son Niveau.
S’entrainer. Une fois par Niveau, cela permet à un Aventurier de payer un professeur durant une quinzaine de jours afin de pouvoir tenter un test pour gagner une progression supplémentaire. Cela concourt également à donner un intérêt à l’argent : plus le professeur est compétent (et donc cher), plus vos chances de succès sont élevées.
Ressentir les creux pour profiter des sommets
Ainsi, il arrivera donc à vos Aventuriers d’avoir un peu de temps à tuer, pendant que l’un des leurs se retape.
Rassurez-vous, cela n’arrive pas non plus à chaque séance : Hardi incite les joueurs à la prudence et offre à leurs personnages des moyens d’éviter les blessures (en se protégeant, en utilisant un bouclier…). Sur les 40 sessions jouées, nous avons eu deux périodes de “temps calme”, d’environ 15 jours chacune.
Évidemment, il n’est pas question d’endormir la tablée en faisant jouer en détail ces périodes : elles sont résumées, traitées narrativement, et rarement jouées.
Cela dit, il est important de ne pas simplement les bâcler.
Prendre le temps de vivre
En effet, ces moments sont des fenêtres privilégiées durant lesquelles chaque joueur devrait avoir l’occasion de faire tisser des liens à son personnage.
Amitiés, romances, implication dans une communauté… les moments de “creux” dans votre partie sont en fait les moments forts dans la vie sociale de vos personnages.
Ne les négligez pas, car ce sont autant d’opportunités pour vos Aventuriers de trouver l’amour, de fonder une famille, de s'intégrer dans un lieu, de voir passer les saisons, de créer des liens… qu’en bon MJ, vous pourrez réutiliser dans la suite de la campagne ; car sauver une jeune femme en détresse ne sera jamais aussi crucial que lorsqu’il s’agit de la mère de leurs enfants.
Bref, en ralentissant la temporalité, vous permettez à vos Aventuriers d’être autre chose que des murderhobos qui speedrunnent les donjons, vous leur permettez tout simplement… de vivre.
J’espère que cet article aura su susciter votre intérêt et vous permettre d’aborder ma vision des choses. J’aurais encore beaucoup à dire, mais il est déjà bien long. Je reste à votre disposition en cas de question.
À la prochaine, prenez soin de vous, prenez le temps de vivre et … soyez Hardi !
Article 9 — Les statuts (15/01/21)
Bonjour à tous.
Aujourd’hui, j’aborde les statuts dans hardi.
C’est quoi un statut ?
C’est une notion qui n’est ni nouvelle ni propre à mon jeu, mais que j’ai essayé de standardiser dans hardi et que je vous incite à utiliser.
Un statut, c’est un adjectif (ou une courte phrase) qui caractérise un état temporaire affecté à une chose (personne, lieu, objet…) et qui porte intrinsèquement une notion d’incertitude sur sa durée, matérialisée par un Δ.
Alors, c’est bien dit, mais ce n’est peut-être pas très parlant. Détaillons un peu.
Pour rappel, un Δ (appelé “dé de ressource” et prononcé “delta” ) est un dé (d4, d6, d8, d10…) dont le “rang” va baisser lorsqu’il roule sur 1,2 ou 3 : un d10 baisse à d8, un d6 baisse à d4 et un d4 disparait ou bien n’est plus utilisable.
Les statuts utilisent donc les dés de ressource Δ pour quantifier leur “durée”, en se basant sur leur “espérance de vie” statistique :
Dé de ressource Nombre moyen de lancers avant épuisement
Δ4 1
Δ6 3
Δ8 6
Δ10 9
Δ12 13
Δ20 20
Si une arme a été trempée dans l’eau bénite, le MJ devrait lui appliquer le statut “bénie” et décider de la durée appropriée, probablement un Δ4. Si elle a été frottée avec un enduit empoisonné, elle acquiert le statut “empoisonnée Δ6” (ou Δ8) selon la qualité du poison et de l’enduit. Et si on y a gravé une rune temporaire de pouvoir, elle pourrait devenir “runique Δ20”. Si par contre, une arme a été forgée par un dieu, elle aura le qualificatif “divine”, mais si cet état n’est pas temporaire, cela ne relève pas d’un statut.
À quoi servent les statuts ?
C’est la toute leur beauté : ils servent dans une multitude de cas, dès que vous voulez altérer temporairement les propriétés de quelque chose. Un soldat peut être ivre Δ8 après une soirée à l’auberge, un entrepôt peut être enflammé Δ12, un combattant peut être empêtré Δ4 dans des bolas, le suzerain peut avoir été empoisonné Δ20 et un navire peut être en train de couler Δ10… Votre imagination est la seule limite à leur utilisation.
Incertitudes
Un point inhérent aux statuts, c’est l’incertitude sur leur durée, et cela fait tout leur sel, en créant constamment de la surprise à la table.
Prenons un exemple : Les PJ ramènent un large trésor en bateau, lorsque celui-ci heurte un récif et commence à prendre l’eau. Le MJ annonce : “Le bateau coule pour de bon dans 1d8 tours”. Si le dé roule sur un 1, tout le monde fonce sur les barques en oubliant le trésor ; s’il roule sur un 8, tout le monde fonce sauver ce qui peut l’être avant de retourner aux barques. Bref, quelle que soit la durée avant le naufrage, elle est connue, et les joueuses peuvent donc planifier leurs actions en connaissance.
Maintenant, si la MJ annonce “le navire gagne le statut En train de couler Δ8”, celui-ci peut se retrouver sous l’eau dans 6 tours (en moyenne) comme dans 11 ou 18… mais aussi peut-être dans 3 ou 4 tours !
Les joueurs ne se disent plus “est-ce que j’ai le temps de sauver un coffre rempli d’or ?” mais “est-ce que je prends le risque de le faire ?” Ça change beaucoup de choses.
De même, vous ne ressentirez jamais autant l’intervention divine que lorsque la prière d’un prêtre accorde à une arme le statut “bénie Δ4” pendant 5 tours d’affilée ! C’est tellement statistiquement improbable que ça en devient un petit instant magique à la table, l’un de ces petits riens qui font les aventures mémorables.
Applications mécaniques des statuts
Vu leur versatilité, et le fait que hardi est un jeu OSR qui prône les “décisions de MJ”, il n’y a pas qu’une seule application mécanique aux statuts, mais plusieurs possibles. Le MJ devra décider de manière logique celles qu’il emploie dans une situation donnée, et en informer la tablée.
Unité de temps
Le premier critère à décider pour un statut va être l’unité de temps à laquelle se réfère le Δ, qui va entièrement dépendre du contexte :
Une arme affutée Δ4 ou un gobelin assommé Δ6 le seront pendant des rounds de combat.
Une personne parfumée Δ8 le sera pendant des heures.
Un Aventurier malade Δ10 va l’être durant des jours.
Un hiver glacial Δ6 durera des mois…
Il est important que la MJ fixe l’unité de temps du statut, afin de déterminer quand les tester (lancer leur Δ pour vérifier leur évolution) : si la lame affutée Δ4 est testée au moment d’infliger les dégâts, le statut assommé Δ6 du gobelin sera testé à la fin de chaque tour, et on testera chaque mois pour voir si l’hiver est toujours glacial.
Impact mécanique
Il faudra ensuite décider si le statut à un impact mécanique, et là encore, ils peuvent être très variés, et très subtils. Ce sera à la MJ de trancher.
Si une journée ensoleillée Δ8 risque de n'être que cosmétique, une nuit à la lune cachée par les nuages Δ6 pourrait impliquer un désavantage sur les tests de perception visuelle tant que l’astre nocturne reste obscurci.
Les statuts peuvent donc octroyer des avantages, des capacités ou des bonus, mais également infliger des dégâts.Une simple épée bénie Δ4 sera désormais légitime à blesser fantômes et morts-vivants, mais pourra aussi accorder un bonus de dégâts, sous la forme du résultat du Δ4.Ces dégâts, souvent liés à des statuts affectés à des armes (du genre bénie, enflammée, empoisonnée…) ou à des statuts délétères (enflammé, empoisonné, hémorragie…) conviennent bien pour des valeurs de Δ faible (du Δ4 au Δ8). Attention au-delà, car ils auront tendance non seulement à “faire plus mal”, mais également à durer plus longtemps.
Cela dit, vous pouvez tout à fait opter pour un bonus de dégât fixe, décorrélé de la durée du statut : une hache runique Δ20 n’offrirait par exemple qu’un bonus fixe de +2 points de dégâts, histoire de ne pas déséquilibrer les combats.
Explosivité
Certains statuts, ceux aptes à empirer, vont pouvoir être qualifiés d’explosifs par le MJ. Ils sont alors notés avec un ! supplémentaire, et ont la capacité d’augmenter d’un rang lorsque le Δ roule sur sa valeur maximale.
Le statut enflammé appliqué à un objet (ou une personne) combustible sera le cas d’application le plus fréquent. Ainsi, un Aventurier enflammé Δ6! lors d’un combat contre un élémental de feu verra le statut passer à Δ8! si le dé roule sur un 6. Évidemment, enflammé est un statut tout disposé à infliger des dégâts à son porteur, à la hauteur de la valeur affichée par le dé. Le statut malade ! est lui aussi un bon exemple de statut explosif.
Interactivité
Enfin, certains statuts permettront parfois aux joueuses d’interagir avec eux, que ce soit pour les épuiser, ou les renforcer. En combat, on considère que dépenser une action permet d’ajuster d’un rang un statut donné (en restant raccord avec la fiction) sans besoin de test. Ainsi, un Aventurier empêtré dans un filet Δ6 pourra dépenser une action pour faire baisser son rang à Δ4 (ou s’enrouler dedans pour le monter à Δ8), avant qu’on ne teste le statut ce tour-ci.
Statuons !
En définitive, les statuts m’apparaissent comme des outils intéressants, de par :
leur grande versatilité, que ce soit juste pour créer de l’ambiance, du détail, ou de petits bonus ça et là,
la facilité avec laquelle le MJ est libre d’en inventer à la volée, notamment pour récompenser des joueuses ingénieuses,
la part intrinsèque d’incertitude qu’ils amènent à la table, apte à surprendre joueurs et MJ,
les possibilités de proactivité qu’ils offrent aux joueuses, que ce soit pour en créer, ou bien faire diminuer leur rang.
J’espère là vous avoir démontré l'intérêt de la chose, et que vous avez désormais le statut intéressé par hardi Δ10.
N’hésitez pas à vous abonner à la mailing-list (juste en dessous de cet article) pour être tenu informé de l’actualité du jeu.
D’ici là, à la prochaine, prenez soin de vous, restez au chaud et … soyez hardi !
Article 10 — Les dés capés (22/01/21)
Bonjour à tous.
Aujourd’hui, j’explique dans ce court article ce que sont les dés capés dans hardi.
Les dés capés ? C'est quoi encore que ça ?
Comme pour les statuts la semaine dernière, les dés capés ne sont pas une idée foncièrement nouvelle, mais juste la formalisation d’un concept déjà existant ailleurs, afin de faciliter et favoriser son utilisation.
D’où viennent-ils ? Qui sont-ils ?
[Je ne parle ici que de ma propre expérience, je n’ai pas fait de recherches pour savoir où et quand le concept est né].
Hardi tient une partie de ses gènes de Macchiato Monsters, d’Eric Nieudan, jeu dans lequel il est dit en substance que “les dés maximums d’armure et de dégâts que vous pouvez avoir sont égaux à votre type de Dés de Vie (DV)”.
Donc si votre DV est un d6, et bien vous ferez au maximum d6 dégâts, quelle que soit l’arme que vous utilisez. Car dans ce jeu, comme dans hardi, les DV sont l’image de votre aptitude guerrière (la progression pour les faire passer au rang supérieur s'appelle d’ailleurs “Entrainement martial”) et ils limitent donc vos prouesses au combat.
Et dans Hardi ?
J’ai décidé de garder ce concept qui me plaisait bien, mais en l’adaptant légèrement à mes besoins, et en le formalisant pour généraliser son usage.
Premièrement, en dépit de ses origines et de sa tonalité réaliste et rude, hardi est un jeu héroïque : si les Aventuriers commencent comme simples paysans et bouseux, ils sont animés par les feux de la bravoure et sont capables de réaliser des prouesses, notamment via l’usage de dés d’héroïsme (DH), un d8 bonus pouvant s’ajouter au résultat d’un test. Il fallait donc qu’au lieu d'être restrictive comme dans Macchiato Monsters, cette limitation des dégâts des armes soit incitative.
[L’armure n’est pas gérée via un dé dans hardi, et n’est donc pas concernée par cette limitation, qui sera plutôt d’ordre monétaire (une bonne armure, c’est cher) et réaliste (une armure de plate, c’est fait sur mesure, ce n’est pas du prêt-à-porter)].
Deuxièmement, à cause de la possibilité de combats verbaux (voir l’article 1) dans hardi, j’avais besoin de définir la quantité de dommages que ces attaques infligent à la vaillance adverse. Je veux être incitatif, pour que la discussion soit une vraie option de résolution des conflits, mais sans être trop efficace, pour ne pas en faire “une attaque psionique qui ne dit pas son nom” (dixit Cryoban). Après avoir envisagé et testé plusieurs solutions (du gros d12 à de petites valeurs fixes), j’ai décidé d’utiliser les dés capés ; et c’est même ce qui m’a incité à les formaliser.
Concrètement c’est quoi un dé capé ?
Un dé capé, noté đ (un d minuscule barré) est un dé dont la valeur maximale est limitée par une autre valeur. Les résultats du dé dépassant la limite sont ramenés à la limite.
Voilà pour la définition, mais ce sera bien plus parlant avec des exemples :
Exemple A. Votre Aventurier a subi un premier entrainement martial, et son DV est un d8. Il se bat avec une lourde flamberge, qui fait d12 dégâts. Enfin, plus exactement, elle fait đ12 dégâts : tous les résultats du d12 qui dépassent 8 valent 8. Cela équivaut donc à lancer un d12 dont les faces afficheraient 1-2-3-4-5-6-7-8-8-8-8-8.
Exemple B. Pour les dommages des attaques verbales, j’ai choisi d’utiliser un đ10* qui est capé par le modificateur de l’axe (INT, SAG ou CHA) utilisé pour l’attaque.
Votre sage lettré (INT de 16 / mINT de +6) tente de raisonner un assaillant ? S'il réussit, il inflige đ10, limité par son mINT, soit 6. Cela revient à lancer un dé 1-2-3-4-5-6-6-6-6-6.
Si c’est le gros Robert qui tente la même chose avec son intelligence de 12, il lance đ10, capé à 2, soit un dé 1-2-2-2-2-2-2-2-2-2.
Et si c’est Glörf le puant, demi-ogre avec 8 de CHA (et donc un mCHA à -2) qui fait de même, le đ10 capé se comporte comme si toutes ses faces affichaient “-2” : son attaque verbale est tellement nulle qu’elle redonne de la vaillance à son adversaire !
*Ce đ10 est encore en cours de test, je le ramènerai à đ8 si c’est trop fort.
De l’intérêt des dés capés (đ) ?
Actuellement dans hardi, seuls les dégâts (physiques et verbaux) utilisent des đ.
Ils ont pour intérêt :
De ne pas être ni punitifs, ni trop limitatifs, lorsque l’on utilise une grosse arme que l’on ne peut pas encore complètement maitriser. Reprenant mon Exemple A, cela permet à l’Aventurier d’utiliser l’arme de son choix, sans restrictions arbitraires, tout en gardant un intérêt à utiliser une flamberge (đ12) plutôt qu’une simple épée (đ8) : il a ainsi bien plus de chance de faire 8 dégâts. Je trouve que c’est un compromis élégant entre le reflet de la maitrise d’une arme par un Aventurier et la puissance intrinsèque d’une arme tel qu’on l’envisage traditionnellement en JdR (plus c’est gros, plus ça fait mal).
Étant un reflet direct des Carac de l’Aventurier, cela l'incite à s’améliorer, en récompensant immédiatement ses progrès (entrainement martial ou amélioration de caractéristique).
Souvenez-vous que, comme présenté dans l’article 8 sur la temporalité, les passages de niveau dans hardi ne sont pas magiquement immédiats, et requièrent deux bonnes semaines dédiées à l’entrainement : c’est à prendre en compte si le méchant de la campagne a réussi à prendre la fuite à la séance précédente. Faut-il se lancer immédiatement à sa poursuite, ou bien lui laisser 15 jours d’avance, mais se remettre en chasse avec de nouvelles aptitudes, forces, sorts et compétences ?
Voilà pour cette semaine, où j’espère vous avoir démontré avec succès l'intérêt décapant des dés capés.
Si vous voyez d’autres domaines où leur utilisation serait intéressante, n'hésitez pas ! Je me tiens à disposition sur les forums Casus No et Casus Belli, ou bien encore par e-mail.
Sinon, je vous dis à la prochaine et … soyez Hardi !
Article 11 — Les voyages (29/01/21)
Bonjour à tous.
Aujourd’hui, j’aborde la façon dont les voyages sont traités narrativement dans Hardi.
Voyages
Les longs voyages sont souvent des moments compliqués en JdR, où trouver l'équilibre entre la – trop rapide – ellipse totale (“Bon, et bien, deux semaines plus tard, vous arrivez à destination”) et le – bien trop long – détail complet de chaque kilomètre parcouru, peut-être délicat.
Pour proposer des voyages qui soient rapides à jouer (sans nécessiter d’y consacrer des séances entières) mais qui ne soient pas non plus dénués de tout événement et intérêt, Hardi repose sur une méthode entièrement narrative qui permet à chacun d’apporter sa contribution au périple.
Tour à tour, les membres de la tablée vont raconter un événement, un incident, un obstacle, une péripétie… qui survient durant le voyage : cela peut être une pastille comique, la rencontre avec un PNJ récurrent ou inventé sur le coup, ou encore une simple embuscade contre des brigands. Toute la tablée peut intervenir pour raconter comment ils réagissent, participent, ou aident à surmonter l'obstacle…
Le plus important est qu’aucun jet de dés, aucun test n’est requis : il s’agit juste d’avoir le plaisir et l’opportunité d'introduire des éléments, des personnages, des événements qui viennent colorer le récit, faire briller un personnage, ou simplement casser la monotonie du voyage.
Une fois que tout le monde (MJ inclus) a narré une pastille, il sera temps de conclure le voyage, qui aura ma foi été bien rempli, en n’ayant consommé que peu de temps de jeu.
L’intérêt du voyage narratif
Cette méthode narrative présente de nombreux intérêts :
C'est une méthode simple et rapide (comptez environ 30 à 60 minutes au total) qui offre malgré cela des voyages remplis de péripéties et d’événements,
Cela permet aux joueurs et joueuses d'introduire des éléments qui leur plaisent (et au MJ de noter ce qui semble les attirer comme thèmes et situations pour les réutiliser ultérieurement), ou bien de mettre en lumière un aspect précis de leur personnage,
Elle peuple à peu de frais un univers avec des PNJ dont les joueurs se souviendront d’autant mieux que c’est eux qui les ont inventés. C’est également l’occasion pour les joueuses d’introduire un PNJ afin d’amorcer (ou de faire avancer) un arc personnel, mais c’est aussi pour le MJ le moment idéal pour faire du foreshadowing : introduire très tôt un événement ou un personnage qui aura une importance cruciale par la suite.
Enfin, elle offre l’opportunité au MJ d’être à l'écoute des attentes des joueurs et joueuses, qui s’expriment d’autant plus librement que le voyage est une sorte de parenthèse, qui fait partie de la campagne en cours, mais sans être soumis à autant d’impératifs scénaristiques. C’est un espace de liberté pour les joueurs, accordé par le MJ en échange d’informations tacites sur les Aventuriers.
Comment mener un voyage narratif
Si durant le voyage, les joueuses ont un pouvoir narratif accru, il n’est pas pour autant absolu. Rappelez si besoin à la tablée que le MJ est là pour assurer la cohérence de l’histoire et de l’univers, et qu’il se réserve le droit d’amender ou de modifier certaines de leurs propositions les plus extrêmes.
En effet, offrir aux joueurs la possibilité de tout faire n’implique pas qu’ils puisent faire n’importe quoi.
Par exemple, il est peu crédible et probablement nuisible à l’histoire que des Aventuriers de niveau 1 aient pu terrasser un dragon lors de leur premier voyage vers la capitale. Pour autant, plutôt que de mettre bêtement votre véto de MJ sur cette péripétie (“Non ! Vous n’avez pas tué de dragon, trouve-moi autre chose”), réfléchissez deux secondes au pourquoi de cette proposition.
Sans doute que la joueuse à l’initiative de cette péripétie veut prouver la bravoure de son Aventurier, ou recherche la gloire par ses exploits. S’il est probablement trop tôt dans la campagne pour lui offrir la gloire, vous pouvez par contre aisément vanter sa bravoure. Décrivez le “dragon” en question comme un imposant reptile (peut-être un serpent ou un varan géant, quelque chose à portée d’un groupe de niveau 1) et demandez à chaque Aventurier comment il participe pour tuer ou mettre en fuite ce terrifiant monstre (n’oubliez jamais que si vos joueurs ont probablement déjà posé les yeux sur un Monster Manual, ce n’est pas le cas des Aventuriers !).
Bref, dans la mesure du possible, évitez de dire “non” aux propositions de la tablée lors de cette phase narrative, jouez sur les perceptions et les twists pour leur donner presque ce qu’ils veulent.
Il est également conseillé que le MJ prenne son tour d’inventer une péripétie après que la plupart des joueurs l’aient fait, afin :
de pouvoir rebondir sur des situations ou réintroduire des PNJ inventés par les autres, en les faisant évoluer.
de pouvoir offrir un autre type d’événement que ceux déjà proposés par les joueurs. S’ils ont été timides et n’ont proposé que de petits interludes cosmétiques ou comiques, décrivez un combat ou une embuscade et demandez-leur comment ils y participent. Au contraire, si le voyage n’a été qu’une suite d’embuches et d’obstacles, offrez-leur une parenthèse bucolique, un moment touchant ou poétique.
Enfin, s’il n’est pas question de tests lors de ces vignettes narratives, elles peuvent quand même déboucher sur des effets mécaniques : sachez récompenser l’inventivité de vos joueuses.
Si l’une d’entre elles décrit son duel contre un terrifiant adversaire et choisit de subir des blessures pour la plausibilité de l’histoire, offrez-lui par exemple un dé d'héroïsme bonus. Si un Aventurier délaisse ses compagnons aux prises avec un abordage des pirates pour aller piller leurs cales en douce, permettez-lui de rapporter une cassette remplie de pièces…
Dernier point : à moins que le voyage n’ait lieu dans une région stérile et dévastée, ne vous embêtez pas à décompter les vivres lors du voyage ; les Aventuriers arriveront bien à prendre un peu de gibier ou de poisson lors de leurs arrêts et escales.
Si vous souhaitez que le voyage ait un impact financier, décidez d’un coût unitaire pour celui-ci (incluant à minima les rations de voyage nécessaires, mais il pourrait y avoir des péages, des taxes…) et annoncez-le à la tablée avant leur départ.
Voilà, j’espère que cette approche vous plaira, et n'hésitez pas à l’utiliser dans vos jeux. Comme d’habitude, je répondrai avec plaisir à vos questions.
Sinon, je vous dis à la prochaine, bon voyage et … soyez Hardi !